En Pologne, trente ans après la chute du Mur de Berlin, la transition démocratique toujours en débat

Article publié sur Le Courrier d’Europe Centrale à l’occasion du 30e anniversaire de la chute du Mur de Berlin.

Les Polonais ont une obsession de leur histoire, aussi bien ancienne que récente. Comme peu d’autres nations, ils se plaisent à la ressasser et à la réécrire, comme si cette permanente révision pouvait fondamentalement améliorer leur condition présente. Une des théories récentes qui circule au sujet de la révolution du syndicat Solidarnosc des années 1980, et que ce fût une révolte essentiellement motivée par la dignité matérielle, plus que par de réelles revendications démocratiques, au sens occidental du terme. Après tout, les revendications des ouvriers étaient, à leur origine, d’ordre purement matériel, avant que des intellectuels comme Adam Michnik, Bronislaw Geremek où Jacek Kuron ne viennent y greffer les idéaux des Lumières.

Cette théorie expliquerait la popularité importante des ultraconservateurs du parti Droit et Justice (PiS), au pouvoir depuis 2015, en dépit de leur remise en cause des principes de la séparation des pouvoirs et de leurs manœuvres ostensiblement inconstitutionnelles. Grâce à la politique sociale d’ampleur que le parti de Jaroslaw Kaczynski a mise en place « en contrepartie », les portefeuilles des Polonais et les centres commerciaux géants qui parsèment le pays n’ont jamais été aussi remplis, et une majorité de la population semble indifférente aux imbroglios institutionnels autour de l’Etat de droit.

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La Pologne et sa croix

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L’immense impact du film documentaire sur la pédophilie dans l’Eglise « Ne le dit à personne » (14 millions de vues sur Youtube en cinq jours) remet au coeur du débat le rôle de l’Eglise dans la sphère publique, et ses liens avec le monde politique.

Pour rappel, article publié dans les pages « Idées » du Monde le 20 octobre 2016, dans un contexte où les associations ultra-catholiques tentaient de durcir la législation encadrant l’avortement en Pologne.

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L’interdiction totale de l’avortement en Pologne n’a donc pas eu lieu. Quelques jours après la mobilisation sans précédent des « femmes en grève », lundi 3 octobre 2016, dans toutes les grandes villes, le parti conservateur au pouvoir, Droit et justice (PiS), a renoncé à durcir la loi sur l’IVG, déjà l’une des plus restrictives d’Europe.

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Pour lutter contre les populismes, un nécessaire changement de paradigme économique

« Tant que la forme de l’actuel capitalisme ne changera pas, des personnes de la sorte de Trump continueront d’arriver au pouvoir » argumentait le philosophe polonais Andrzej Szahaj, peu après l’élection de Donald Trump, dans les colonnes du quotidien conservateur polonais « Rzeczpospolita. » Selon lui, le terme de « populisme » utilisé à tord et à travers pour disqualifier d’emblée tous les arguments qui vont à contre-courant de la pensée économique dominante, est devenu « un outil de déni de réalité » pour de nombreux commentateurs. Lire la suite

Le populisme s’ancre profondément en Pologne

[Analyse] (Le Monde, 24 octobre 2016) « L’impossibilisme. » C’est par ce néologisme que le président du PiS (Droit et Justice), Jaroslaw Kaczynski, caractérise la démocratie libérale. Un aspect contre lequel son gouvernement a la ferme intention de lutter. Un an après l’arrivée au pouvoir du parti ultraconservateur en Pologne, et même si l’interdiction totale de l’avortement a été rejetée, rien ne semble impossible pour la majorité.

Son projet de réforme de la société polonaise a un caractère total : il concerne tous les aspects de la vie publique, de l’économie au social, en passant par l’école, la culture et l’histoire. Les contre-pouvoirs, au premier rang desquels le Tribunal constitutionnel, perçus comme des freins à la « révolution conservatrice », sont en voie d’être neutralisés. Même s’il faut, à coup de projets de loi votés au nom de la sacro-sainte « souveraineté populaire », enfreindre la Constitution polonaise. Lire la suite

La « décommunisation », serpent de mer de la Pologne

[Idées] (Le Monde, 14 avril 2016) Symbole d’une histoire dont les plaies peinent à se cicatriser, la question de la « lustration » – la décommunisation de l’appareil d’Etat, et plus largement, de la vie publique – revient régulièrement à grand fracas dans le débat public polonais depuis près d’un quart de siècle. Elle constitue l’un des principaux points de clivage depuis les débuts de la transition démocratique  : d’un côté, un vaste camp modéré libéral farouchement hostile à tout règlement de comptes envers le passé communiste ; de l’autre, la droite ultraconservatrice, pour qui la ­décommunisation n’est jamais allée assez loin.

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La démocratie polonaise face aux fantômes du passé

[Idées] (ParisBerlin magazine, août 2014) L’apaisement de la mémoire collective reste un défi majeur de la démocratie polonaise qui lutte encore avec son passé communiste. Rétrospective d’une démocratie jeune de quelque 25 années.

Le 4 juin dernier les Polonais célébraient le 25e anniversaire des premières élections partiellement libres qui amorcèrent en 1989 la chute du système communiste. Cette commémoration a été́ l’occasion pour le pays d’effectuer le bilan d’un quart de siècle de transformation politique, économique et sociale. Si le “retour vers l’Occident” a globalement fait l’objet d’un consensus au sein de la population et de la classe politique polonaises, le chemin, dans les détails, a été́ marqué par des remous et des clivages importants, dont les traces sont encore visibles aujourd’hui.

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